Walywood, un projet titanesque pour la Lorraine
Un projet pharaonique passant par l'hôtellerie (un article des BLE)
Aux commandes de Walygator depuis 2006, le parc d’attractions de Maizières-lès-Metz, ils s’efforcent de relancer l’énorme machine laissée à plusieurs reprises à l’agonie, alors qu’au moment de son lancement à l’époque des Schtroumpfs, elle était censée drainer 2 millions de visiteurs. Elle avait en tout cas été conçue pour.
Ce pari en passe d’être tenu, les deux forains n’avaient cependant pas l’intention d’en rester-là. Ainsi, ils ont dernièrement annoncé la création, d’ici 2015, d’une zone de loisirs et de tourisme sur 48 hectares, dans le prolongement des 42 hectares du parc existant, afin de créer un site de loisirs unique en Europe, tourné essentiellement vers l’hôtellerie et avec de nouvelles grandes infrastructures. Ils ont notamment imaginé l’installation d’un parc aquatique intérieur et extérieur de 5 200 mètres carrés, d’un espace ludique pour les enfants de 1 300 m², d’une salle de spectacle/cabaret de 800 places sur 2 100 m², d’un mini-golf, d’un centre des congrès et de séminaires sur 5 200 m², d’un village commercial, d’un hard-rock café de 1 200 m² et d’une tour panoramique qui culminerait à 106 mètres. Bref, un projet titanesque, sans compter que l’ensemble devrait être agrémenté d’un hôtel 4 étoiles de 100 chambres, d’un 3 étoiles de 300 chambres et d’un dernier établissement 2 étoiles d’une capacité de 600 chambres. Soit en tout, un nouveau complexe hôtelier de plus de 1 000 chambres. Pour celui-ci, les dirigeants de Walygator auraient déjà rencontré des groupes hôteliers susceptibles de s’implanter.
En effet, les frères Le Douarin estiment qu’ils doivent impérativement passer par l’hôtellerie pour développer leur complexe, à l’image de ce qui se fait ailleurs en Europe. Mais dès lors, une première interrogation nous vient à l’esprit : comment remplir des chambres d’hôtel alors que le parc a une dimension régionale et qu’il est seulement ouvert la moitié de l’année ? A cela, les dirigeants de Walygator répondent que le but est d’attirer une nouvelle clientèle, celle des affaires, grâce au centre de congrès et à la salle de spectacle/cabaret, mais aussi grâce aux restaurants. A partir de ce moment, celle-ci pourra se loger dans les hôtels du parc. De même, la clientèle « traditionnelle», à savoir individuelle et familiale, mais aussi de groupes, sera quant à elle attirée par les hôtels si l’offre s’améliore en qualité et en quantité au sein du parc d’attractions. Ceci passera donc par la création de nouvelles attractions et autres animations, selon l’étude de faisabilité réalisée pour le complexe hôtelier.
Un pari financier, une mine pour l'emploi
L’investissement s’élèverait ainsi à près de 110 millions d’euros, auxquels il faudrait encore ajouter environ 50 millions d’euros afin de réaliser une éco liaison, plus précisément un monorail, allant du pôle thermal et touristique d’Amnéville à Walywood. Le projet des frères Le Douarin devrait permettre la création de 656 emplois, dont 510 à temps plein. Une véritable mine d’or pour cette ancienne vallée sidérurgique ! Et une solution pour ces friches du sillon mosellan que les élus cherchent depuis plusieurs années à revitaliser. Ces dernières pourraient désormais devenir une Mecque du divertissement. Malgré le scepticisme affiché de certains, des études de faisabilité et de marché réalisées tendent à montrer que ces nouvelles infrastructures trouveraient bien leur public.
L’autre grande question qui reste pour le moment sans réponse est de savoir comment les frères Le Douarin vont trouver le financement pour ce grand projet. Ils comptent cela dit sur le soutien de l’Europe, de la France et des différentes collectivités territoriales. De même, des investisseurs privés seraient évidemment associés au projet, sans que l’on ait pour le moment plus de précisions sur ces hommes d’affaires qui préfèreraient, par les temps qui courent, placer leur argent dans ce type de projet plutôt que dans les banques. L’exploitation de ce nouveau complexe aura également un grand impact sur l’économie locale en ce qui concerne les approvisionnements et la maintenance de certains équipements. Le chiffre d’affaire annuel serait ainsi estimé à environ 8,5 millions d’euros pour les prestataires. Les dépenses des clients en dehors du parc sont quant à elles estimées à plus de 2 millions d’euros pour les commerces, sorties, visites et autres divertissements. Walywood représente en outre un énorme potentiel fiscal pour les collectivités locales, qui devraient percevoir des millions d’euros en diverses taxes et impôts.
Au niveau de l’emploi que pourrait induire ce considérable projet, il est à noter que dans un premier temps, ce seront en moyenne 560 personnes, tout corps de métiers confondus, qui devraient intervenir sur le chantier de construction du complexe. Mais il y aura bien entendu un impact positif sur les effectifs du parc d’attractions, dans la mesure où 90 nouveaux postes seraient liés à l’augmentation de la fréquentation. Les 656 emplois mentionnés plus haut seraient répartis de la manière suivante selon les études : 115 salariés pour le complexe hôtelier, 85 au niveau du parc aquatique, 269 dans les 3 restaurants envisagés, 40 pour le centre de loisir de nuit, 15 personnes seraient en outre et respectivement affectées au centre des affaires et à la garderie, le mini golf nécessiterait 6 personnes et enfin le Hard Rock Café en emploierait 46 autres. L’accueil, la sécurité, le nettoyage et la maintenance, l’administration et les finances, devraient permettre par ailleurs la création de 92 emplois.
Un projet inscrit dans la tendance écologique actuelle
Enfin, pour ce qui est toujours de la description du projet, à noter que ce dernier s’inscrira dans la tendance écologique actuelle. En effet, les divers éléments du programme devraient s’organiser autour d’une courbe dynamique de verdure, donnant directement accès aux installations d’Amnéville-les-Thermes. Le long de cette courbe sera aménagée une voie de desserte située à environ trois mètres au dessus du niveau actuel du parking. Cette voie sera accessible aux piétons, aux navettes électriques individuelles ou collectives, au déplacement à mode doux, ainsi qu’à un monorail aérien qui desservira plusieurs stations entre Walywood et Amnéville. Les visiteurs seront donc invités à laisser leur véhicule sur le parking puis à monter sur la voie de desserte par une des nombreuses passerelles, construites en matériaux recyclables, afin de parcourir le complexe dans son intégralité. Par ailleurs, des plans d’eau, ainsi que des espaces verts seront aménagés pour rendre le site le plus agréable possible.
Première analyse économique et politique
Voilà pour ce qui est de la description du projet des frères Le Douarin. Celle-ci mérite cela dit d’être analysée et observée à la lumière de plusieurs projecteurs, tant les enjeux économiques et politiques sont importants et les critiques déjà nombreuses. Ainsi, que doit-on par exemple penser d’un tel projet qui évoque un centre de congrès quand on sait que la ville de Metz, toute proche, entend reconstruire le sien dans le nouveau quartier de l’Amphithéâtre ? De même, l’idée de bâtir une nouvelle salle de spectacles, alors que l’offre n’en manque pas dans le secteur, est-elle réellement judicieuse?
En outre, et c’est peut-être la question la plus importante à nos yeux, Walywood serait-il vraiment complémentaire au pôle thermal et de loisirs voisin d’Amnéville ? Enfin, quid dans cette affaire de l’autre projet tout aussi pharaonique du Dr Kiffer, à savoir Orneville, une ville imaginaire censée surgir sur 400 hectares entre Rombas, Pierrevillers et Marange-Silvange, dans le but de regrouper entreprises de pointe et enseignement supérieur, et pourquoi pas un immense marché alimentaire permanent ? Bref, quel avenir pour la Silicon Valley lorraine sortie tout droit des rêves du maire d’Amnéville ?
Le maire de la commune voisine de Talange voit quant à lui d’un très bon œil la possible revitalisation de ces 200 hectares situés sur le bassin Orne/Moselle entre Metz et Thionville. Il se réjouit de même de voir que ce territoire redevienne un véritable enjeu en annonçant qu’un projet est actuellement en cours sur une autre partie du site avec la réalisation d’un lotissement industriel sur 55 hectares de friches, dans une perspective multimodale avec les réseaux ferrés et routiers, ainsi que le canal du Camifemo. Il n’hésite cependant pas à remettre sur le tapis l’installation dans le secteur du grand stade de football qui fait si cruellement défaut à la région. Ce dernier pourrait selon lui parfaitement s’appuyer sur les mètres carrés de surfaces commerciales et de services de Walywood.
Un équation financière difficile
Enfin, concernant le volet financier du projet décrit plus haut, il convient tout de même de se demander quelle sera la hauteur des garanties de financement que seront en mesure d’apporter les frères Le Douarin. Car pour réaliser leur projet, ils demandent près de 50 M€ aux collectivités, sur une tranche 2009-2015. Et quand on sait que les frais de fonctionnement d’un simple parc aquatique sont déjà vertigineux… De même, s’il est clair qu’il faut savoir prendre des risques, il nous paraît cela dit difficile de ne pas envisager ce qu’il adviendra de toutes ces belles infrastructures si le complexe se casse littéralement la figure. De même, ne peut-on pas penser que l’offre est quelque peu déjà saturée dans ce secteur avec Eurodisney, le parc Astérix et Europa Park, sans oublier tous les complexes à taille humaine dans la grande région, comme par exemple Fraiserpuis City ?
Bataille ouverte pour la troisième industrie de la Lorraine
En conclusion de cette étude, les BLE estiment que toutes les interrogations précédentes méritent d’être posées, mais qu’à bien y réfléchir Walywood apparaît comme une formidable opportunité de développement de redynamisation pour tout un secteur, qui ne pourra que contribuer à l’image d’une Lorraine touristique. D’une Lorraine qui va de l’avant. Cela dit, il convient de mettre avant tout l’accent sur la synergie avec le site d’Amnéville et la halte fluviale afin de mettre sur pied une véritable complémentarité. Le principal danger est de voir le projet se retrouver au cœur d’une nouvelle bataille touristique et politique dans laquelle chacun essaierait de tirer vers son côté, au détriment de l’intérêt général. Car les Lorrains doivent désormais se mettre bien en tête que le tourisme constitue la troisième industrie de leur province.
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